La mauvaise passe

Un joueur en mauvaise posture

Un joueur en mauvaise posture

Pour cet article, au lieu d’aborder un aspect très général du mahjong, je vais une fois n’est pas coutume vous raconter ma vie. Ces derniers temps, je ne gagne pas autant que je le voudrais. Enfin, cette formulation est mauvaise dans la mesure où je voudrais gagner tout le temps, donc plus précisément : je ne gagne pas autant que j’estime pouvoir gagner.



Ce que je veux dire par là, c’est que la fréquence de mes victoires (tout au moins ressentie) me semble inférieure à ce à quoi mon niveau de jeu devrait me permettre de m’attendre. Le mahjong étant un jeu de hasard, il y a des parties qu’on gagne et d’autres qu’on perd, ce sont des probabilités. Mais sur un certain nombre de parties les probabilités tendent à devenir des statistiques, et les chances qu’on a de gagner deviennent des proportions de victoires. C’est une des mesures objectives du niveau d’un joueur. Si l’on ne se base que sur cet élément, sur un grand nombre de parties, un joueur strictement moyen arrivera en tête un quart du temps, en deuxième place un quart du temps, etc. Un joueur très bon arrivera en tête ou deuxième plus souvent, un joueur moins talentueux sera plutôt aux troisième et quatrième places. Personnellement, la satisfaction que je tire du mahjong ne réside pas dans la victoire en elle-même, qui est imprévisible, mais sur ma progression au long terme. Autrement dit, ça ne me dérange pas de perdre une partie si j’estime que j’ai joué correctement.

Panne

J’ai parlé de ce problème à mon généraliste, et il m’a répondu que ça arrivait à tout le monde et que le mieux était encore d’en parler avec son partenaire. Je ne suis pas sûr qu’il ait exactement compris de quel jeu il s’agissait, mais bon. Il a raison sur un point en tous cas : ça arrive à tout le monde ! Tous les joueurs qui pratiquent un jeu au long court ont parfois de ces périodes où il semble impossible de progresser voire même de maintenir son niveau. Le corollaire, c’est que c’est arrivé même aux meilleurs et qu’ils s’en sont sortis. Il ne faut donc pas rester dans son coin à se lamenter ou à rejeter la faute sur des forces extérieures, mais au contraire se remettre en question, essayer de cerner les causes de ce passage à vide et si possible y remédier.

5/20, même pas la moyenne

Première chose à faire : essayer de voir si cette frustration est réellement fondée, c’est à dire si ce manque de performance est réel ou ressenti. Il faut donc s’appuyer sur des données et rechercher d’éventuels biais : si par exemple on joue dans un nouvel endroit il est tout simplement possible que les joueurs soient plus forts que ceux auxquels on avait l’habitude de se confronter. En ce qui concerne les données, dans le cadre de parties entre amis il peut être difficile de tenir les comptes. Personnellement je ne marque pas mon placement et mon score à chaque partie, loin de là. En revanche je joue aussi en ligne, et là le système s’occupe de ça pour moi. Verdict : sur mes 20 dernières parties jouées sur Tenhou, je n’ai réussi à atteindre la première moitié que 5 fois, une fois sur quatre, alors que je suis d’habitude à peu près à la moitié. C’est donc officiel : ma performance mahjonguelle est en très forte baisse !

Les causes

En mettant de côté la superstition voulant que le sort s’acharne contre soi, il peut y avoir plusieurs causes à la mauvaise passe d’un joueur, voire même un mélange de plusieurs choses. L’une d’elles est même souhaitable : il arrive parfois que la progression soit marquée de certains paliers ou retours en arrière, qui correspondent à la prise en compte de nouvelles données nécessitant des ajustements ; un peu comme les jeunes enfants qui au début ont plus de mal à se déplacer sur deux jambes que sur quatre alors qu’il semble évident que sur le long terme ce mode de déplacement est plus approprié. Dans ce cas, il faut simplement persévérer et attendre que ces efforts portent leurs fruits. Il se peut également que ce qui nous retient n’ait rien à voir avec le mahjong : fatigue, problèmes personnels, etc. Dans ce cas, du point de vue mahjong, pas grand chose à faire. Mais là où les choses deviennent dangereuses, c’est quand notre incapacité à gagner vient uniquement de nous !

Frustration

Dans le cas qui nous occupe aujourd’hui, ou en tout cas qui m’occupe moi, il s’agit en grande partie de frustration, et je pense que c’est une cause assez répandue de blocage. Je ne sais plus quand ou comment ça a commencé, mais il s’agit d’un cercle vicieux. Comme je n’ai pas gagné depuis longtemps, mon envie de gagner est trop forte, et je n’arrive plus à la tempérer. Soit je me focalise sur la construction de ma main et en oublie de défendre, soit même je prend sciemment des risques inconsidérés. Il m’arrive de jeter des tuiles dont je pense qu’elles ont de très fortes chances d’être la tuile gagnante d’un joueur, et quand ce dernier déclare : «RON !», je me dis «Ah ! j’en étais sûr !»

Arrête là l’hypocrisie, jeune padawan ! Si tu es sûr qu’une tuile est dangereuse et que tu es assez idiot pour la jeter, tu mérite de payer ! Me voilà en face de ma faiblesse, et il me faut retrouver le flegme qui est indispensable quand on joue à des jeux de hasard où il faut mesurer les bénéfices et les risques. La solution ? Elle est différente pour chacun, et il n’est pas sûr qu’un joueur donné sache ce qui est bon pour lui. En ce qui me concerne, je profite de l’existence de ce blog et du fait que rien n’y a été posté depuis un moment pour vous avouer mon infirmité. De cette façon, la prochaine fois que je vous dépouillerait d’un baiman pour lequel vous vous êtes battu en donnant à un autre joueur une tuile gagnante trop prévisible, vous pourrez me trainer dans la boue et me fouetter en place publique afin de me faire regagner mes sens !

«Che fous égoutte !»

«Che fous égoutte !»

Introspection

Si vous vous retrouvez dans une mauvaise passe, c’est que quelque chose cloche, jusque là pas de problème. Ce qui est difficile en revanche, c’est de comprendre pourquoi, qu’est-ce qui, dans vos mécanismes de jeu, vous bloque. L’astuce, c’est qu’il n’y a que vous qui ayez la réponse, enfouie en vous, et qu’il va falloir faire sortir. Comme je doute que vous ayez le loisir de vous rendre chez le psy juste pour des mauvaises performances au mahjong, il va probablement falloir s’en sortir tout seul. Pour vous aider à faire le point, voici pour conclure cet article une petite liste de questions à se poser élaborées par vos spécialistes Anthony et mézigue au cours d’une attaque cérébrale téléphonique. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, ou de points à additionner, ce sont juste des questions qu’on peut se poser et qui peuvent nous aiguiller —à moins que ça ne vous aide pas du tout.

  • Est-ce qu’il vous arrive souvent d’ouvrir votre jeu en pensant que vous poussez la chance un peu trop ?
  • À l’inverse, vous dites-vous parfois que vous devriez ouvrir sur une main donnée sans que vous ne passiez pas le pas ?
  • Est-ce que les yakus que vous visez sont conformes en proportion à ceux que vous avez l’habitude de tenter ?
  • Vous arrive-t-il de jeter une tuile automatiquement et de le regretter dans la seconde suivante ?
  • Vous sentez vous parfois submergé par vos adversaires ?
  • Vous arrive-t-il de jouer vite sans trop faire attention, juste pour mettre un terme à la partie en cours et en commencer une autre ?
  • Vous dites-vous parfois que vos adversaires ont un « mauvais » style et qu’il vous est impossible de gagner dans ces conditions ?

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